Mardi 15 et jeudi 17 décembre 2020, entre 17h et 19h, les lycéens volontaires ont eu l’occasion de mettre en pratique l’invitation de l’apôtre saint Jean à aimer non pas « en paroles ni par des discours, mais par des actes et en vérité » (1 Jn 3, 18). Les voilà parti en maraude, en petits groupes de six, par les rues du centre-ville de Strasbourg accompagnés d’un bénévole de l’Ordre de Malte et d’enseignants, à la rencontre de ceux de leurs frères qui vivent dans la rue. Ils ont emporté avec eux des thermos, et des cabas remplis des produits de première nécessité prélevés sur la collecte généreuse de la communauté éducative de Sainte-Anne pendant le temps de l’Avent. Un café bien sucré ou un thé, une boîte de pâté ou de maquereau, un peu de pain, un tube de dentifrice, un paquet de rasoirs, une bouteille de shampoing et puis des bredeles, petite douceur dans l’âpreté de la vie dehors. Surtout, il y a les conversations, avec ces hommes, à qui, habituellement, on ne parle jamais. Ils se plaignent peu, sont le plus souvent affables et polis. Nous nous souviendrons sans doute toujours de Michel, 62 ans, dans la rue depuis trop longtemps. Il n’en peut plus, au bout du rouleau, et n’aspire qu’à une seule chose : une nuit au sec, dans une chambre sans voisins qui ronflent, la télé juste comme ça pour la compagnie et par-dessus tout, une douche. Une douche pour se décrasser, soulager ses démangeaisons qui ne le quittent plus. Il nous montre son épaule criblée. Une nuit, seulement une nuit. Le bénévole qui nous accompagne passe un coup de fil. Peut-être arrivera-t-on à lui trouver un lit ce soir.
Ce qui frappe dans son attitude à lui, le bénévole, c’est sa posture sans apitoiement ni sensiblerie. Il n’est pas là pour pleurer sur les déshérités de la Terre, mais seulement être là, poser des gestes précis, se renseigner sur la santé, aider s’il le peut. Il ne juge pas, ne donne pas de conseil, ne leur raconte pas d’histoire, blague un peu. Il les connaît tous par leur nom. Une leçon.
19h, il faut rentrer avant le couvre-feu de 20h. Chacun retrouvera la chaleur de son foyer, son confort bien légitime au demeurant. Tout à l’heure, nous aurons repris le cours de notre vie. Eux, ceux de la rue, nos frères si proches et si lointains, resteront sur leur trottoir. Qu’aurons-nous vécu, alors ? Une expérience de plus ? Serons-nous contents de nous ? Est-ce que la vie aura le même goût ? Est-ce que ça aura changé quelque chose pour eux, pour nous ?
Ne pas oublier. Raconter. Sensibiliser. Tout cela, il nous faudra le faire. Pas pour jouer aux humanitaires en herbes, pas pour faire les malins. Mais, parce que, espérons-le, nous nous souviendrons de Michel et des autres, qu’ils auront désormais un prénom et une voix. Parce que nous aurons croisé leur regard. Parce que peut-être nous aurons compris que Noël, c’est la fraternité et parce qu’il ne suffit pas de le chanter.
Merci à Sadik, Adam, Elise, Thomas, Louise, Lana, Lise, Noa, Lucie, Anouk, Rose, Alessia et à tous ceux qui n’ont pas pu venir et qui viendront plus tard. Merci à Louis, ses filles, Cécile, Mathilde, et Laurent.
En janvier, nous organiserons d’autres maraudes.
Joyeux Noël à toutes et tous !
















